mercredi 3 septembre 2014

Pour une écologie dénataliste - Contre une démographie sauvage et la pauvreté

Pour une écologie dénataliste
Contre une démographie sauvage et la pauvreté


Cette conscience de sa condition, qui différencie l'homme des autres espèces animales est de plus en plus affirmée, en ces temps d'information à outrance à laquelle n'échappent pas ceux qui vivent dans la précarité. Probablement est-ce ce qui motive la montée des revendications de toutes sortes partout dans le monde, les effets de la compassion, de la charité, de la solidarité, étant encore loin de faire oublier le mirage de la lutte des classes. Comme l'écrivait Paul Valéry, s'il est vrai que l'homme est davantage préoccupé par ce qui devrait être que par ce qui est – au point que nombre de politiques puissent fonder leur succès sur la promesse d'un réenchantement du rêve d'une société plus juste –, les réalités de la condition humaine perdurent, en dépit des incontestables bienfaits du progrès.

Si à l’aube de notre ère la Terre était peuplée d’environ 250 millions d’êtres humains, elle en comptera bientôt 10 et plus, dont 2 vivront dans un état de pauvreté profonde. Avec la complicité des pouvoirs religieux comme laïcs, un progrès effréné a donc créé, en un peu plus de 20 siècles, près de 10 fois plus de miséreux qu’il y avait d’individus de toutes conditions sur Terre. Et chaque jour 250 000 êtres humains s'ajoutent à la population terrestre. Or, en raison de la structure incontournablement pyramidale de la société, par l'effet d'une fatalité qui les fait naître ce qu'ils sont, et de taux de natalités atteignant 3 à 4 fois ceux des riches, la grande majorité de ces nouveaux arrivants est constituée de pauvres (dont les pauvres profonds) qui viennent s'ajouter à ceux qui occupent déjà la base de notre pyramide sociale.

S'il n'est réellement de richesse que d'hommes, cet homme ne vaut-il pas mieux que cette situation et que l'avenir détestable qu'il se promet si rien n'est fait pour y mettre fin ? Les pauvres peuvent-ils continuer d'être les victimes d'un mécanisme infernal, tout en étant les premiers pourvoyeurs des moyens humains qui en constituent le moteur ? Se plaindre d'être les esclaves de la société tout en se multipliant et en condamnant ses descendant à son propre sort n'est-il pas un comble ? Toujours est-il que les plus déshérités d'entre nous continuent à être toujours plus nombreux à alimenter ce brasier du développement qui nous dévore tous – en même temps que notre planète – et dont le profit, comme par convection, va d'abord à ceux qui président à leur destin.

La poursuite du progrès au détriment des conditions d'existence d'un nombre croissant d'individus doit cesser. Pour l'amélioration du sort de tous et le retour à des conditions environnementales aussi durablement viables que le permettront les restes des ressources de la planète, le devoir prioritaire de la société est désormais d'aider par tous les moyens, pourvu qu'ils soient dignes, l'homme à limiter sa fécondité, sachant que par simple effet de proportion, les plus déshérités seront les plus nombreux à en subir les effets.

Même s'il émerge avec quelques années de retard et qu'il y ait peu à attendre de son manichéisme, le débat qui agite le pouvoir en France bien après qu'il ait commencé en d'autres lieux, concernant le choix entre croissance et son contraire, est probablement à compter parmi les signes de la modération qui s'impose. « Il ne sert strictement à rien de créer 100.000 nouveaux emplois si, en même temps, apparaissent 100.000 [150 000] nouveaux candidats sur le marché du travail ... » Ainsi conclut une récente étude d'une université américaine, qui prévoit que 50% des emplois seront, d'ici 20 à 30 ans, occupés par des robots. C'est donc une erreur de croire qu'il nous faut faire plus d'enfants pour payer nos pensions. Au contraire, moins nombreux seront nos enfants, plus ils seront riches … et donc plus élevées seront nos pensions. »www.one.baby.fr (Lettre ouverte).

Naître moins nombreux ou vivre moins vieux, tel a été le choix qui a été offert aux hommes durant les deux derniers siècles. Ils l'ont ignoré en laissant s'emballer une croissance économique et démographique que ne maîtriseront dorénavant pas davantage la superstition que les idéologies et postures politiques. Certes, les effets cruels du vieillissement de la population attendent la société, mais ce sera le prix à payer pour une négligence coupable de la plupart des élites, véritable crime contre l'humanité dont elles auront à répondre devant les générations futures.

C’est avec une population drastiquement réduite, par la seule dénatalité, autorisant la maîtrise et le dosage de ses efforts de productivité en mettant sa créativité au service du mieux plutôt que du toujours plus, que la société produira moins, consommera moins et gaspillera moins. C'est aussi par une population moindre que le nombre de pauvres se réduisant proportionnellement à leur place dans une pyramide sociale moins peuplée, l’équilibre social, détruit avant tout par un surnombre devenu ingouvernable, pourra se rétablir. C’est notre seule chance, quels que soient notre place et notre rôle dans cette société, de continuer à bénéficier de l’essentiel des avantages que le progrès nous a procuré au cours des siècles et dont nous avons abusé et continuons stupidement d’abuser, au point de mettre la planète elle-même en péril.

Le poids de la pauvreté étant moindre, la société ne pourra qu’y gagner en efficacité dans son rôle civilisateur renouant avec un humanisme que lui ont fait perdre de vue autant l'humanitaire, dans son combat contre une injustice sociale structurelle, que le matérialisme. Relâchant sa pression sur ses forces vives pour les laisser remplir leur rôle moteur d’intérêt général, qui est d’œuvrer à l'épanouissement des hommes – à ne pas confondre avec leur confort – ce sera privilégier la qualité, la richesse, le progrès, la civilisation, en un mot la vie, telle que nous la souhaitons plutôt que comme elle s'impose dans son exubérance.